J’aime le client, tu aimes le client, il aime le client et nous aimons le client : Les entreprises qui affichent leur orientation client, enjeux de visibilité et défis de fiabilité
Avec la mode de l’orientation client qui a envahi toutes les directions marketing des grandes entreprises, notamment dans le secteur des services, en suivant la démarche marketing, cet article répond à trois questions : D’abord, c’est quoi une entreprise orientée client ? Ensuite, quels sont les principaux défis à relever pour une entreprise qui déclare son amour permanent pour les clients ? Et enfin, quels outils marketing rigoureusement et régulièrement utilisés, sont-ils en mesure de permettre à l’entreprise de consolider et de renforcer son orientation client ?
BERNARD-ALAIN NDZOGOUE (*)
L’ENTREPRISE ORIENTEE CLIENTS : DE QUOI PARLE-TON ?
- Une brève histoire de l’entreprise orientée client est importante. L’adage le plus humoristique et le plus connu de tous les professionnels du marketing est celui qui proclame que « le Client est roi » et doit être doit l’alpha et l’oméga de toutes les réflexions et actions de production, marketing, communication et vente. Cet adage qui est une invitation à mettre en permanence le client au centre de toutes les décisions dans l’entreprise, montre clairement que dans une économie de marché, caractérisée par une concurrence de plus en plus rude, l’évolution de toute entreprise, est déterminée par le client. Il est vrai que cet adage qui date du début du XIXe siècle avec l’expansion du commerce de détail, venait en opposition à la fameuse « loi des débouchés naturels »[1] de l’économiste et industriel français Jean-Baptiste Say (1767-1832) qui affirmait que « l’offre crée sa propre demande ». En d’autres termes chaque produit ou service offert, finit toujours par trouver son propre client et le succès à long terme d’une entreprise lié à son système de production et non à son système client. Aujourd’hui, dans une économie mondialisée, le client est comme un oiseau rare qui doit être placé au centre de l’entreprise et faire l’objet de toutes les attentions.
- Une entreprise orientée client place effectivement le client actuel et potentiel au centre de sa vision, de sa stratégie et de ses activités. En effet, la richesse et la puissance des entreprises tous secteurs confondus, résident de plus en plus dans leurs clients[2]. La part de marché est remplacée par la part de la clientèle et actuellement la valorisation d’une entreprise notamment dans le secteur des services, est de plus en plus concentrée sur son fichier clientèle, et cela en considérant que chaque client vaut beaucoup d’argent. Dès lors, il est nécessaire de comprendre les attentes des clients et anticiper leurs besoins. Cela représente un objectif majeur pour de nombreuses firmes, qui souhaitent augmenter la rentabilité et la fidélité de leurs clients. C’est donc une vision radicalement nouvelle de la relation client/entreprise. Le Management de la relation client ou CRM a connu ces dernières années un développement exceptionnel. Certaines grandes entreprises se sont dotées avec succès de centres de contact performants et coûteux pour mieux gérer tous les moments de contact avec leurs clients
- Une entreprise orientée client est aussi orientée sur ses collaborateurs internes. Plus l’expérience des collaborateurs est riche, plus ils vont enrichir l’expérience client. En effet, le concept orientation client est plus global et une entreprise orientée client est celle dans laquelle toutes les ressources humaines et les principales parties prenantes externes, quelle que soit leur fonction et leur niveau d’implication, ont une forte conscience du rôle qu‘ils ont à jouer pour assurer en permanence à chaque client final, un parcours exceptionnel et une expérience mémorable. En effet, dans une économie de marché caractérisée par une concurrence de plus en plus rude et avec des normes et des standards qui s’imposent à tous, l’orientation client est devenue un facteur clé de différentiation. Les clients veulent toujours plus de réactivité, rapidité, fluidité, simplicité et personnalisation.
- Dans une entreprise orientée client, les clients fidèles consomment et font consommer. Dès lors, l’écoute et la satisfaction de la clientèle sont de puissants leviers de développement. A cet effet, l’outil de mesure NPS (Net Promoter Score) est d’une grande utilité. Les clients ne se contentent plus des produits ou services qu’ils avaient l’habitude d’obtenir. Ils souhaitent vivre une expérience de plus en plus personnalisée. Ils s’attendent à ce que les entreprises qui interagissent avec eux, les connaissent de façon à leur proposer des offres et des solutions sur mesure. Dans le domaine des services notamment, Ils veulent avoir accès à des applications libre-service personnalisées, et ils n’hésitent pas à exprimer leur mécontentement et notamment sur les médias sociaux fréquemment. Ils sont essentiellement volatiles et délaisser une entreprise pour se tourner vers la concurrence, est une pratique courante. Les entreprises orientées clients doivent donc trouver un moyen de répondre avec une très grande agilité et rapidité, à ces demandes. Les clients sont de mieux informés, et ils deviennent difficile de trouver et de conserver de nouveaux clients. Rappelez-vous toujours de l’adage très populaire chez tous les commerçants : fidéliser un client coûte 3 à 6 fois moins cher que de le recruter. Dans certains secteurs, tels que celui des télécommunications, la stratégie d’acquisition de nouveaux clients aboutit presque toujours à une guerre des prix avec les concurrents, ruineuse économiquement pour tous les compétiteurs car considérée comme un jeu à sommes nulles.
Encadré :
Depuis quelques années, les entreprises et les organisations camerounaises ont découvert l’orientation client et mettent le client au cœur de leur signature et de leurs différentes affiches publicitaires « Votre partenaire pour l’avenir » BGFI Cameroun, « Passionnément clients » Activa Cameroun ; « Assurer les femmes pour mieux protéger l’humanité » Activa Cameroun ; « Pour vous, nous restons ouverts 24h/24 » BGFI Cameroun ; « Notre banque s’engage à offrir à sa clientèle de grandes et moyennes entreprises, de professionnels, d’institutions, d’associations et de particuliers, des produits de qualité, flexibles et innovants, adaptés à leurs besoins » de SG Cameroun ; « Améliorer la vie des gens au quotidien en créant des services simples et innovants qui les aident à mieux communiquer entre eux et à partager » Orange Cameroun ; Orange ; « Everywhere you go » MTN Cameroun; « Pour nous, l’essentiel, c’est vous » GMC ; « Vous rapprocher de l’essentiel » Orange Cameroun; « …Et ce n’est pas fini ! » de CAMTEL; « Good food, Good life » NESTLE Cameroun ; « We are the energy of Cameroon » de ENEO SA Cameroun ; « Aidez-nous à sauver des vies. » Croix Rouge Cameroun ; « LE GROUPE SABC C’EST VOUS ! » ; « Guinness is good for you » ; « C’est irrésistible » de UCB ; « Il a fallu de temps…pour atteindre la perfection » de UBC ; « Agir et réussir ensemble » GICAM ; « L’étoile du Cameroun » CAMAIR-CO ; « Donner la confiance et favoriser le dépassement de soi en fournissant les vêtements, les chaussures et les accessoires de sport les plus innovants » City Sport Cameroun ; |
POUR RESTER DANS LA TRAJECTOIRE DE L’ORIENTATION CLIENT : LES TROIS PRINCIPAUX DEFIS A RELEVER
Pour faire de l’orientation client une pratique quotidienne dans toute l’entreprise, les directions marketing devraient relever trois principaux défis, à savoir : (i) le défi du capital humain), le défi de la culture d’entreprise véritablement orientée client et (iii) le défi d’une gestion dynamique des connaissances relevant du domaine de knowledge management.
Premier défi : Le développement du capital humain comme une priorité pour l’entreprise orientée client
- L’entreprise orientée clients doit se concentrer sur le développement du capital humain de l’entreprise. Le capital humain correspond à l’ensemble des connaissances, des compétences et de l’expérience accumulées qui ont pour effet de rendre les salariés plus productifs. Depuis Adam Smith, la plupart des économistes reconnaissent que les compétences de la main d’œuvre d’une entreprise ou d’un pays représentent un de ses atouts concurrentiels les plus importants. Les origines de la théorie moderne du capital humain remontent aux années 60, lors que Theodore Schultz (prix Nobel d’économie Théodore Schultz en 1961), puis Gary Becker, proposent leurs analyses théoriques et empiriques des liens entre l’investissement en capital humain et la rémunération en général[3]. Plusieurs décennies ont été nécessaires pour que le concept de capital humain s’impose comme un facteur clé de différentiation auprès des entreprises et des investisseurs
- Le capital humain peut se déprécier si les compétences acquises ne sont pas maintenues en bon état par un usage régulier. Au même titre que les clients, le capital humain, représenté par les salariés, joue un rôle déterminant dans la réussite de l’entreprise. La gouvernance des entreprisesdoit tenir compte des salariés en tant que propriétaires du capital humain, élément essentiel à la performance globale au même titre que le capital financier ou le capital naturel. Dans cette dynamique, depuis 2018, le comité technique de l’ISO a ouvert la marche en proposant en la norme ISO 30414 intitulée “Management des ressources humaines : Lignes directrices sur le bilan du capital humain à l’attention des parties prenantes internes et externes”, qui permet aux entreprises de tous types et de toutes tailles d’avoir une vision claire de la valeur ajoutée réelle de leur capital humain.
Deuxième défi : Une forte culture d’entreprise comme facteur clé de succès
- C’est à partir des années 1970 que la culture d’entreprise fait un retour en force dans le management à la fois du côté des praticiens que des universitaires[4]. La culture d’entreprise est un système intégré de représentations et de valeurs partagées par tous les membres d’une entreprise avec deux fonctions essentielles : (i) mobiliser les énergies et les focaliser sur des objectifs majeurs et (ii) canaliser les comportements autour d’un certain nombre de normes d’action[5]. A titre de rappel la culture d’entreprise intègre trois dimensions, d’abord comme réalité culturelle dans une société déterminée (culture sociétale), ensuite comme dynamique culturelle d’une entreprise spécifique (culture d’entreprise) et enfin comme projet culturel en construction au sein d’une entreprise vis-à-vis de l’ensemble de son personnel (culture projet). La mise en place d’une culture orientée client doit se vivre et se voir dans les actions du quotidien de l’ensemble des ressources humaines de l’entreprise. Dès lors, la culture de l’entreprise doit alors concentrer son management autour de valeurs fortes et d’une vision client partagée pour donner du sens, impulser la démarche et embarquer l’ensemble des collaborateurs. La relation client est l’affaire de tous et pas seulement du Marketing ou de la Direction générale. En effet, plus les collaborateurs sont associés à la démarche, plus ils sont impliqués et portent la « bonne nouvelle » partout dans l’entreprise. Le discours seul ne suffit pas. L’ensemble des salariés de l’entreprise doit percevoir la vision, comprendre la stratégie, ressentir la volonté de la direction et surtout voir les actions se décliner pour être capables d’eux-mêmes d’en mesurer les impacts sur leurs activités quotidiennes. En bref, l’idée est de faire de la culture d’entreprise, une ressource stratégique, voire un avantage compétitif, permettant à l’entreprise de consolider son positionnement sur le marché.
- Dans le monde village planétaire et au rythme accéléré, qui est le nôtre, les entreprises sont ce que sont leurs systèmes, c’est-à-dire, leurs modes d’organisation et leurs modalités de gouvernance avec comme enjeux majeurs, les méthodes de coordination des activités, des salariés et des sous-traitants. Si elles veulent être orientées clients, leurs systèmes doivent être axés sur la clientèle. Si leur point fort est la qualité du service, leurs systèmes doivent aider leur personnel à offrir à chaque client, un excellent service. A ce titre, il n’y a pas d’entreprise sans culture d’entreprise dans la mesure où il s’agit toujours de gens mis ensemble pour faire quelque chose d’économiquement utile avec une focalisation sur la satisfaction du client. Le concept de culture d’entreprise traduit une dynamique sociale fondamentale de toute organisation du fait qu’il s’agit toujours de personnes en interaction dans un contexte social donné. A titre d’exemple, « le modèle japonais de culture d’entreprise » ne peut pas être utilisé au Cameroun par une filiale japonaise comme au Japon, il doit être contextualisé à l’aune de la culture camerounaise. La culture d’entreprise est ainsi directement liée au contrôle des comportements et donc à l’exercice du pouvoir. Elle fournit en effet aux acteurs, les indicateurs de contexte dont ils ont besoin pour se situer au sein de l’organisation et pour déterminer dans quel ensemble de comportements ils doivent faire des choix et agir s’ils veulent rester en adéquation avec les normes d’action.
Troisième défi : La gestion dynamique et partagée de la connaissance (Knowledge management) comme atout majeur
- Pour le philosophe Francis Bacon, le père de l’empirisme moderne « La connaissance est un pouvoir car elle permet d’agir sur l’objet étudié de façon à obtenir ce que l’on veut de lui[6]». La gestion des connaissances (« Knowledge Management ») s’inscrit désormais dans la réalité de l’entreprise : la connaissance est un enjeu économique majeur de demain. Créer, capitaliser et partager son capital de connaissance est devenu la préoccupation de toute organisation performante. La gestion de la connaissance dans une organisation, traverse toutes les composantes. Elle concerne tant la stratégie, que l’organisation de la structure et les nombreux processus opérationnels mis en place. Le « Knowledge Management » est aussi défini comme l’ensemble des méthodes et des techniques qui permettent de percevoir, d’identifier, d’analyser, d’organiser, de mémoriser et de partager des connaissances entre les membres d’une ou de plusieurs organisations, et en particulier les savoirs créés par l’entreprise elle-même[7]. L’objectif principal est donc simple : Offrir aux entreprises un moyen centralisé, évolutif et pratique, pour collecter, mettre à jour et partager les informations essentielles de l’entreprise. Ces données sur les clients et la marque sont notamment celles qui peuvent aider les équipes en charge de la relation client à mieux prendre en charge les problématiques clients.[8] l’idée est donc de décloisonner l’information. L’information n’appartenant plus à une équipe, voire un service (commercial, marketing, digital, relation client, informatique…), elle est accessible à tous, facilement, tout en étant actualisée en temps réel. Cette démarche implique une forte volonté du top management et de tous ceux qui utilisent les informations, une dynamique de production et de diffusion de la connaissance utile. Le « Knowledge Management » doit s’appuyer sur des technologies de l’information qui offrent des possibilités encore sous-utilisées. Il doit faire l’objet d’une approche cohérente et innovante, qui donne la garantie que le patrimoine de connaissances de l’entreprise est géré au mieux, surtout en ce qui concerne la connaissance des clients.
- En effet, aujourd’hui, les entreprises qui mettent le client au centre de leur stratégie, ne peuvent plus se permettre d’être dans l’inaction, face à la gestion et au partage de la connaissance, car le partage en temps réel offre une longueur d’avance, pour créer des expériences clients inoubliables. Cet enjeu est encore plus important notamment pour les entreprises qui affichent leur orientation client, car, Il permet au personnel d’accéder en temps réel aux informations pertinentes sur les besoins et attentes des clients, et donc d’apporter au plus vite des réponses aux demandes des clients et par ricochet d’augmenter l’impact sur la satisfaction client. Les attentes et exigences des prospects et clients étant en constante évolution, il devient impératif que les entreprises diffusent les informations actualisées et personnalisées afin d’atteindre le bon client et au bon moment. A titre d’exemple, lorsqu’un client s’adresse appelle le service client, il attend et exige une réponse rapide et pertinente, quel que soit le canal d’échange et quel que soit l’interlocuteur au sein de la structure. Ainsi donc, la mise en place d’un système de gestion et de partage de la connaissance, est un atout majeur. Ce système contribue à rendre le client plus autonome, tout au long de son parcours. Implémenter un système de « Knowledge Management » prend du temps car cette démarche exige des efforts et des investissements dans toute l’entreprise. C’est un processus continu et capable d’évoluer dans le temps, au rythme des besoins et des objectifs de l’entreprise. Ainsi, il est indispensable de suivre l’évolution de sa stratégie dans la durée grâce aux objectifs et aux indicateurs de performance définis en amont et suivis en aval avec une documentation permanente du système de gestion des connaissances. La meilleure façon de gérer la relation client, est donc d’exploiter l’ensemble des informations dont dispose l’entreprise sur ses clients. Il existe de nombreux moyens d’entrer en possession de ces informations à travers les technologies comme celle du Big Data ou mégadonnées ou grosses données, qui regroupe une famille d’outils répondant à une triple problématique : un volume de données important à traiter, une grande variété d’informations en provenance de multiples sources et une très grande vitesse dans la réponse aux requêtes formulées.
DE LA STRATEGIE ORIENTEE CLIENT AUX OUTILS DE MESURE
L’enquête client mystère : Un puissant outil de la direction marketing, pour le monitoring le long de la trajectoire de l’orientation client
- La technique des enquêtes client mystère fait partie de la panoplie des outils fréquemment utilisés par les organisations (privées comme publiques) pour atteindre un double objectif : (i) séduire/rassurer/fidéliser le destinataire du service ; (ii) faire entendre la voix du « client » dans l’organisation et légitimer le changement auprès des salariés. C ‘est aux Etats-Unis que le concept a commencé à être appliqué par les entreprises, dans les années 40. Ce sont d’abord les banques qui ont utilisé la technique en envoyant des faux clients dans leurs agences pour effectuer des dépôts d’argent en liquide et noter le déroulement de la transaction. Il s’agissait alors de détecter des comportements fautifs éventuels du personnel de caisse. La méthode a progressivement intéressé d’autres secteurs d’activité, qui y ont vu un moyen efficace d’évaluer leurs réseaux et leurs équipes, en appréciant le service rendu sur le point de vente, du point du vue du client.[9] La vocation de cette technique, très complémentaire à celle des études de satisfaction, est de réduire l’écart entre ce que la marque veut apporter au client et la réalité de la prestation effectivement rendue. C’est donc une problématique majeure puisqu’elle concerne la maitrise du respect des engagements. Les enquêtes client mystère sont très prisées pour évaluer la qualité et l’efficacité de la relation client. Son déploiement demande exige que plusieurs conditions soient réunies. D’abord, la visite mystère doit préserver l’anonymat du client. Ensuite, un scénario précis doit être rédigé et scrupuleusement suivi par le faux client lors de sa mission. Ce scénario est minutieusement préparé afin de garantir la qualité et la crédibilité des données collectées. Enfin, l’évaluation, à l’aide d’une grille critériée identique pour toutes les organisations étudiées lors de la même enquête, doit avoir lieu immédiatement après la mission. Cela permet d’éviter des biais et des pertes d’informations liés à l’oubli selon Bradbury et Milford, 2003. La déontologie que les professionnels des enquêtes clients-mystères se doivent d’observer est basée principalement sur les recommandations de la charte internationale publiée par l’ICC/ESOMAR : The International Code of Marketing and Social Research Practice. Étant donné la popularité et la pertinence du recours à cette technique dans les organisations, plusieurs agences spécialisées offrent leur expertise en la matière (Calvert, 2005). Au Cameroun le Cabinet de Conseil Cible Etudes & Conseil est incontestablement parmi les meilleurs dans le domaine.
L’enquête de satisfaction : Un outil couramment utilisé, mais qui a des limites
- Méthode standard de collecte de données, l’enquête de satisfaction vise à recueillir les opinions des clients sur des produits ou services. Cette enquête qui doit être confiée à un professionnel indépendant, consiste à demander à un échantillon de clients de l’entreprise commanditaire, via un formulaire, à quel point ils sont satisfaits. Pour avoir leurs ressentiments et vérifier que les actions d’amélioration de leur satisfaction, sont efficaces. Cet outil très prisépar les professionnels du Marketing dans les organisations, se base des indicateurs jugés à priori pertinents. Dès lors, l’enquête de satisfaction client devient un outil limité. Premièrement, ces enquêtes fournissent principalement des informations quantitatives, comme le Net Promoter Score ou le score de satisfaction client (CSAT), qui n’offrent qu’une vision partielle de ce que pensent véritablement les clients. Le suivi de l’évolution dans le temps de ces indicateurs, à la hausse ou à la baisse, ne fait pas pour autant comprendre le pourquoi de cette évolution. Deuxièmement, généralement ces enquêtes ne mesurent que ce qui existe. Or un client peut être satisfait de ce qu’offre une marque, mais il peut aussi la quitter parce qu’un concurrent propose quelque chose en plus. Elle n’offre guère de visibilité sur les véritables déterminants de la loyauté et de la fidélité des clients. La mesure de la satisfaction client reste donc superficielle par rapport aux comportements futurs des clients. Elle passe à côté de la « big picture » et ne permet pas de mesurer la valeur économique d’un client. Par conséquent, il faut aller plus loin et prendre en compte l’ensemble des interactions entre le client et la marque.
- Pour cela, des outils comme le diagramme ou matrice de Kano est plus pertinent et plus riche d’enseignements. De plus en plus largement utilisé, cet outil, au-delà de mesurer la satisfaction client, s’intéresse également à l’insatisfaction et met l’accent sur les différentes fonctionnalités du produit ou du service, de manière à proposer des innovations continues en fonction des points clés d’insatisfaction. Le diagramme est une représentation du niveau de satisfaction d’un client par rapport à un produit ou un service. L’idée maîtresse de ce modèle, théorisé par le japonais Dr Noriaki Kano en 1984, est que la satisfaction et l’insatisfaction d’un client en face de la présence ou non d’une fonction pour un produit ou service, ne sont pas symétriquement opposées. L’originalité de l’approche réside dans la dissociation de la satisfaction et de la non satisfaction au regard de la présence ou pas de la fonction attendue par le client. En effet, le diagramme de Kano est construit sur deux axes : L’axe vertical représente le degré de satisfaction du client et l’axe horizontal représente le degré de réalisation ou de présence d’une fonction, d’une caractéristique ou d’un service. A titre d’exemple : la présence de freins défaillants lors de l’achat d’une voiture neuve, entraine l’insatisfaction alors que la présence de freins fonctionnels, ne donne aucune satisfaction car c’est une attente de base. Dès lors, pour le même produit ou service on va évaluer d’abord les attentes de base qui doivent être impérativement satisfaites au risque de voir le client se tourner vers la concurrence, ensuite les attentes proportionnelles qui augmentent le niveau de satisfaction du client avec le niveau de performance délivré par la fonction et enfin les attentes attractives à travers lesquelles le fournisseur surprend son client avec une fonction à valeur ajoutée qu’il n’attendait pas, ces fonctions qui vont au-delà des attentes du client propulsent le fournisseur dans une démarche d’innovation continue. Même si la démarche est relativement lourde à conduire, elle présente l’avantage de provoquer l’écoute attentive des clients et d’améliorer ainsi la compréhension des attentes du marché en général et de sa clientèle en particulier. En tant que puissant outil d’aide à la décision, au moment de développer ou d’améliorer un produit ou un service, l’entreprise peut utiliser le modèle de Kano pour déterminer les fonctionnalités sur lesquelles miser en termes d’attentes attractives ou proportionnelles et les fonctionnalités sur lesquelles ne pas investir en recherche et développement.
- En conclusion, loin d’être un simple slogan comme c’est le cas aujourd’hui dans de nombreuses entreprises, l’orientation client a pour finalité, la quête continue de la satisfaction du client. C’est un puissant outil d’explication et de justification des stratégies et des objectifs poursuivis par les responsables du marketing, tant au niveau central que des unités opérationnelles. Parce qu’elle permet de structurer l’organisation et le pilotage des produits et services offerts aux clients, l’orientation client implique une profonde évolution des esprits et attitudes, des comportements, des pratiques et des modes d’organisation. Sur ce chantier, la Direction marketing joue un rôle essentiel. Les budgets marketing doivent comporter des objectifs clairs et des indicateurs de performance pertinents pour la mesure de l’impact sur la satisfaction des clients, pour chaque franc CFA de dépenses marketing. Le chemin à parcourir est encore long et compliqué. Toutefois, il existe des outils de mesure tels l’enquête client mystère, l’enquête de satisfaction ou le diagramme de Kano qui permettent de crédibiliser l’orientation client, s’ils sont bien compris par les entreprises et mis en œuvre par des professionnels indépendants.
(*) Directeur Technique Central du Cabinet Cible Etudes & Conseil et du Groupe Cible
[1] Jean-Baptiste Say ; Traité d’économie politique ; 1803 ; Chapitre XV ; Des débouchés.
[2] Voir l’excellent ouvrage de Boris Canutchef ; Le Client est roi ; Google Books ; 2015.
[3] Stiglitz Joseph et alii, Principes d’économie moderne, Dunod, Paris, 2007
[4] Pour plus de détails, se reporter à Godelier E., La culture d’entreprise, Paris, La Découverte, 2006.
5 Lemaître N., La culture d’entreprise : facteur de performance, in L’Analyse des organisations : Une anthologie sociologique, Gaëtan Morin, Montréal, 1987.
[6] BACON Francis, Du progrès et de la promotion des savoirs, Gallimard, 1991
[7] https://cursus.edu/fr/12181/developper-un-systeme-de-gestion-des-connaissances-en-entreprise#:~:text=La%20gestion%20des%20connaissances%20est,m%C3%AAme%20ou%20acquis%20de%20l
[8] https://blog.smart-tribune.com/fr/knowledge-management-definition-enjeux
[9] https://www.soft-concept.com/surveymag/enquetes-client-mystere.html
Comments (1)
Merci pour cet excellent article sur l’orientation Client